Pikachu - Pic d'Espade

 A la lueur de nos frontales et au beau milieu de la nuit, nous montons la tente en contrebas du lac d'Aubert. Demain, une chouette journée nous attend ! Un réveil aux aurores serait inutile puisque la voie que nous comptons faire est orientée ouest et qu'aucun de nous n'a envie d'attraper l'onglet dès les premiers mètres de grimpe. Réveil donc à 7h30, plutôt luxueux par rapport à d'habitude ! 

Après un bon p'tit dej... Que dis-je ?! Après un festin 3⭐ qu'on doit à l'excellent gâteau d'Hugo (Marie et Bosco confirmeront), nous prenons la direction du Pic d'Espade. Nous ne pourrons l'apercevoir qu'au dernier moment, après 2h30 de marche pas tout à fait sur les sentiers ! 

Les cordées sont formées : Hugo et Marie, Bosco et Ilona. "Les Malheurs de Pikachu" est la voie qui fera notre bonheur aujourd'hui ! Hugo ouvre la marche pour la première cordée et je fais de même pour la deuxième. Le rocher est d'une qualité incroyable, les longueurs sont magnifiques et la météo exceptionnelle. Bingo ! Le reste de la journée s'annonce bien ! 
Hugo dans la première longueur
Chaque cordée a choisi de progresser en réversible : Marie et Bosco prennent le lead dans la deuxième longueur. 
Dans la troisième longueur, deux cannelures horizontales incroyables permettent de nous élever centimètre par centimètre. Le moindre geste brusque et c'est la zipette assurée ! 
Les longueurs 4 et 5 sont un terrain de jeu idéal pour les adeptes de fissures ! Dülfer, coincement, cheminée... Tous les ingrédients pour nous donner du fil à retordre !
Une fois dans la sixième longueur, nous profitons des derniers mètres sur ce granite incroyable lorsque le ciel, jusqu'alors dégagé, remet son voile.
La 5ème longueur suit cette belle fissure

Arrivés au sommet, trois rappels nous attendent pour atteindre le pied de la voie. Quel sport ! Monter pour redescendre aussitôt... Il faut être dingue ! Et ben nous le sommes et le vivons bien ! Désolés pour Pikachu et ses malheurs mais aujourd'hui nous sommes tous les quatre les plus heureux !! Au bon endroit, au bon moment et en bonne compagnie !
Toute la troupe au sommet

En arrivant au parking, une douche s'impose. Baignade dans la lac d'Aubert où la température de l'eau se mettra en travers de nos ambitions. Sauf pour Bosco qui a déjà sauté depuis dix minutes dans le lac d'Aumar juste au-dessus. Hugo, Marie et moi nous contentons d'un débarbouillage express !

Nous sommes à 20h au camion et l'apéro nous appelle depuis un bon bout de temps. Le repas s'en suit. Big up à la sauce tomate espagnole qui mérite d'être citée !

A minuit, même cirque qu'hier mais cette fois, le montage de la tente s'annonce plus complexe. La zone de bivouac est remplie de touristes et trouver un endroit plat n'est pas une mince affaire. D'ailleurs, nous n'en trouverons pas !


Le réveil sonne un peu trop tôt au vu de notre réactivité à l'éteindre. La nuit a été fraîche et le sommeil entrecoupé par les ronflements des voisins ! Plier la tente est la première mission de la journée (à ne pas sous-estimer). Nous rejoignons ensuite Marie et Bosco pour déjeuner - moment le plus important de la journée. 🥐 Après consultation et vote de chacun, nous optons pour "Le 5ème élément" (6c max) à la muraille du Cap de Long. Les cordées sont inversées : les garçons dans l'une, les filles dans l'autre. Quatre longueurs sur du beau granite suivies de deux rappels (dont un nous a fait monter le pouls!) viennent clôturer ce weekend riche en bons moments !


Merci à Marie et Bosco pour l'organisation et la gestion du week-end, leur patience, leur gentillesse, leur pédagogie,... La liste est longue ! En échange, on vous livrera la super recette du gâteau banane-chocolat d'Hugo ! 😁


Topo "Les Malheurs de Pikachu" ici

Topo "Le Cinquième élément" ici

Aneto par Salenques Tempêtes

De retour les fesses dans le train... Ce soir, je voyage à l'opposé de d'habitude : non pas vers Toulouse mais bien vers Pau... Direction Oloron-Sainte-Marie retrouver Marianne et François pour une chouette nouvelle aventure. Et pas n'importe laquelle ! Celle qui permettra d'écrire sur nos carnets de grimpeurs/apprentis-alpinistes : "Salenques-Tempêtes ~ Aneto, 3404m ✓".

3404m, altitude insignifiante pour la plupart des alpinistes SAUF pour les pyrénéens ! En effet, ce chiffre est le plus grand que nous puissions trouver dans notre cher massif. Pour les collectionneurs de cimes que nous sommes, ce sommet constitue donc une pièce collector et comme si cela ne suffisait pas, nous tenterons de la gravir par une arête mythique : Salenques Tempêtes !

Dimanche 4 Juillet 2021

Départ de Hospital de Venasque où nous décidons de ne pas prendre la navette (ce qui nous rajoute une heure de marche). Ca tombe bien puisqu'après 3 heures de voiture, nous avons bel et bien besoin de nous dégourdir les jambes ! 

Chaque pas éveille en moi des souvenirs enfouis depuis bien longtemps. En 2015, lors de notre traversée des Pyrénées en famille, nous avions fait escale à Besurta pour manger une bonne glace après une (longue) randonnée. Bizarrement, c'est ce qui m'a le plus marqué ! Pourtant en avançant, des paysages familiers apparaissent... A commencer par le "trou du Toro" appelé aussi "el Forau de Aigualluts". 

Il y a quelques années, quand Lilou, Yanis et moi fîmes une pause sur le gros caillou ombragé - exténués et tout transpirants - je n'ai que peu prêté attention à papa et maman qui nous expliquaient que la Garonne prenait sa source ici même. Aujourd'hui, je me trouve au même endroit qu'il y a six ans mais ce lieu ne me paraît plus si insignifiant que ça. Au contraire, le fait que l'eau (issue de la fonte des neiges et du glacier) se trouvant devant moi atterrisse finalement 647km plus loin pour se jeter dans l'océan Atlantique me paraît presque impressionnant. Où est passée mon insouciance ? 

Perdue dans mes pensées, les minutes puis les heures défilent même si le sac me rappelle parfois à l'ordre et me ramène sur Terre, mettant en pause la vague de souvenir qui déferle dans ma tête. 

Au bout d'une heure, nous arrivons au plan d'Aigualluts. Lors de notre traversée en famille, cet endroit était le terminus d'une de nos étapes. Où est passée la LONGUE randonnée ? Elle aussi, s'est envolée avec les années...

L'Aneto en toile de fond
Par la suite, j'évolue en "terres inconnues". Maman avait évidemment dû insister pour que Lilou, Yanis et moi voulions bien continuer un petit peu de marcher mais, évidemment, nous avions refusé. Comme excuse : la fatigue, comme raison : la flemme !

Nous apercevons l'Aneto pour la première fois de la journée. François guide la marche et tient un rythme soutenu (pff ces secouristes... On est bien content qu'ils viennent nous chercher rapidement quand on a un accident mais faire de la rando avec eux n'est pas de tout repos ! ;-). Marianne et moi nous contentons de le suivre à 10, 20, 30m... L'écart se creuse rapidement dès que nous faisons une pause jusqu'à ce qu'une centaine de mètres nous séparent. 

Un fois le Lac des Barrancs contourné, nous arrivons ENFIN au col des Barrancs où nous bivouaquerons ce soir. Je peux enfin poser mon sac pour lequel je n'arrive pas à m'habituer à son poids malgré les sorties à répétition. Est ce que lui aussi s'allègera avec les années ? Je l'espère ! 

Quand le bivouac est installé, chacun vaque à ses occupations : goûter, bronzette, sieste... J'opte pour un peu de lecture et me laisse porter dans la face nord de l'Eiger avec Catherine Destivelle




Le soir venu, nous sommes tous les trois réunis au bord de la cheminée en dégustant un bon repas... Ah non pardon ! ...réunis au bord d'un réchaud, les fesses posées sur un caillou, dégustant un bol de semoule bien plus apprécié qu'un repas près de la cheminée l'aurait été ! Et en prime, au lieu de manger enfermés entre quatre murs, une vue imprenable surplombe notre salle à manger. C'est bon pour la digestion ! Pour ce qui est de la nuit, la pelouse bien fraîche remplacera le matelas moelleux ! Demain, une grosse journée nous attend. Alors, nous sommes tous les trois emmitouflés dans nos duvets à 21h.


Lundi 5 Juillet 2021

Réveil difficile à 4h30 où nous peinons à sortir de nos duvets. Mais il n'est pas question de prendre du retard, le sommet ne nous attendra pas ! P'tit dej efficace et consistant : on peut compter sur un gâteau banane-chocolat supplément prenium gras et sucre ! 

Lever de soleil pendant l'approche
Le jour se lève et nous prenons de la hauteur. A 6h30, nous sommes au pied de l'arête et nous encordons.

Nous progressons tantôt sur le fil de l'arête, tantôt sur des vires rocheuses en contrebas, tantôt à droite, tantôt à gauche, tantôt en corde tendue, tantôt en faisant des relais... Ce qui est sûr, c'est que nous avançons !
 



Les manips de corde si confuses jadis, me viennent aujourd'hui clairement et naturellement. Pourtant, quand je passe en lead, je me perds à plusieurs reprises dans l'itinéraire par - je cite - "manque de curiosité" (l'expérience de François parle !). A croire que la fâcheuse habitude de marcher la tête baissée dans les pieds me suit encore aujourd'hui ! Aussi, Marianne et François ont la patience et la gentillesse de m'aider, m'expliquer, m'indiquer... Et comme d'habitude, j'apprends beaucoup de ces heures de pratique ! 


Le vent fait des siennes - comme souvent - mais il n'a aucune influence sur notre progression, soldée de sourires et de noix de cajou. Les dernières heures, l'équipe s'impatiente à l'idée d'atteindre le sommet et la fatigue se fait sentir. Un peu avant 13h, nous touchons la croix de l'Aneto (société laïque me direz-vous), cachés dans le brouillard. La satisfaction d'être au sommet est importante et l'absence de visibilité ne gâche rien ! Ça y est, nous sommes sur le Toit des Pyrénées


Déjà fiers de l'effort physique fourni, la symbolique de ce sommet participe à la joie collective. Un petit check - plus raisonnable que les bisous et les câlins, merci COVID - et on repart. Une lonnngue descente nous attend et le parking est encore loin !



Sur le glacier (névé est sûrement mieux approprié !), nous perdons vite de l'altitude et les glissades sur les fesses aidant, nous arrivons au col des Barrancs une heure plus tard. Comme nous avions laissé nos duvets, matelas et réchauds pour ne pas avoir à les porter en grimpant, nous les récupérons et en profitons pour prendre un bon goûter qui requinque !

Deux interminables heures plus tard - les descentes sont toujours aussi longues que quand j'étais petite - nous arrivons enfin à la Besurta ! Et, comme si tout était calculé, la navette arrive au même moment. Week-end chanceux ! 

C'est ainsi que s'achève cette belle course qui a remué des souvenirs ! Un grand merci à Marianne et François pour ce beau week-end ! 

Il y a quelques années, en regardant la photo de Papa sur la croix de l'Aneto, ce sommet me semblait infranchissable... Et pourtant...

Papa au sommet de l'Aneto en 2014
Aujourd'hui, la montagne est devenue moins grande, les marches d'approche moins longues et les glaciers moins imposants. Les voies sont devenues plus courtes, mes pas plus rapides et les beaux sommets plus accessibles. Il reste encore bien des choses à faire évoluer et dans dix ans, qu'en sera-t-il ? Affaire à suivre.

Topo de l'arête Salenques Tempêtes